Un loup-garou transformé en chaton

Ce matin, je me réveille dans un monde sans lui, ce chien si particulier qui a tant marqué l’équipe du refuge AVA. Et ça fait mal. Bien sûr, nous sommes habitués, à AVA, à perdre les animaux que nous sauvons et dont nous prenons soin jusqu’à ce que la mort les emporte. Mais lui, c’est différent. Son absence pèse lourd, très lourd.

Chaton – Garou de son vrai nom – a été placé à la ferme-refuge AVA peu de temps avant mon arrivée. Il était un ancien chien de la brigade cynophile de la RATP devenu trop réactif. Ce Berger hollandais m’avait été décrit comme « le chien le plus dangereux du refuge ». Il avait échappé de peu à l’euthanasie, grâce à Thierry Bedossa et à l’Association AVA.

Il avait un protocole de sécurité similaire à celui des animaux sauvages dans les zoos. Personne n’était autorisé à entrer dans son parc.

Les responsables du refuge de l’époque avaient décidé de changer son nom : Garou était devenu Chaton pour casser son image de chien féroce, et l’appeler par un nom qui n’était pas pour lui associé à son passé de chien de travail et à ce qu’il avait pu subir (éducation coercitive). Chaton, c’était le premier pas symbolique vers sa transformation.

Car au fil des années, Garou est bel et bien devenu Chaton.

Sa métamorphose est celle qui m’a le plus touchée en 7 ans à AVA.

Et cela n’aurait pas été possible sans les soigneurs qui ont cru en lui. Il y a d’abord eu Simon qui a été le premier à entrer dans son parc. Puis il y a eu Fanny, qui a bravé les interdits d’alors pour lui permettre de faire ses premières balades. Et enfin, des années plus tard, Sandra, qui a pris le relais en créant à son tour un lien de confiance avec Chaton.

Grâce à eux, durant ses dernières années, qui furent sans doute ses plus belles, Chaton a pu être approché et promené par presque n’importe qui, soigneurs comme bénévoles. Il était aimé de tous.

Chaton m’a tant appris. Il m’a montré que les chiens pouvaient changer. Que la colère pouvait disparaitre.

Il m’a illustré la notion d’individu-dépendance et de contexte-dépendance.

Il m’a montré qu’un chien pouvait s’apaiser, non pas grâce à l’éducation canine, mais grâce au temps, à la force du lien et d’un environnement favorable.

Il m’a montré qu’il fallait accepter les chiens tels qu’ils sont plutôt que d’essayer de les changer.

Il a été l’incarnation parfaite de la mission d’AVA pour le droit à la vie de tous les animaux. Pour le droit à une seconde chance. Pour le droit d’être compris, accepté et aimé en tant qu’individu.

Depuis que je connais Chaton, je me dis, à chaque fois que je vois un chien dangereux, qu’il n’y a pas de causes perdues. Et des chiens dangereux, depuis lui, j’en ai connu beaucoup. C’est lui qui me donne l’énergie de les sauver.

Est arrivé ce jour où il a cessé de manger, de se lever et de faire ses besoins.

Il avait 14 ans et souffrait d’une insuffisance rénale à un stade terminal.

Il a fallu prendre la fameuse décision, l’impossible décision, dans une équipe de soigneurs en larmes, fracturée entre l’urgence de le soulager, et le désir irréaliste de le sauver encore et encore.

Ce matin, je me réveille dans un monde sans Chaton, et ça fait mal. Mais je sais que grâce à lui, grâce à ce qu’il nous a enseigné, d’autres chiens condamnés auront eux aussi droit à une seconde chance.

Merci, Chaton, pour ta leçon de vie et ta confiance. Quelle chance de t’avoir rencontré.

Et merci à nos donateurs sans qui nous ne pourrions pas sauver d’autres chiens comme toi.

Nous l’aimions tellement

Mon petit chat,

Aujourd’hui, on a dû prendre une décision très difficile . Un véritable crève-cœur pour nous, une délivrance pour toi. Le dernier cadeau que nous pouvions te faire.

Nous, soigneurs, nous restons humains et nous avons nos chouchous. Toi tu étais le mien parmi tous les protégés d’AVA.

Je t’aimais tellement mon petit chat.

Quand on a commencé à pouvoir te sortir après des années, c’était l’explosion de joie pour tes soigneurs, au point d’en pleurer. Cette confiance, tu nous l’as tellement rendu… Tu as changé, tu es devenu tellement plus doux, plus serein… on savait qu’on avait gagné quelque chose dans ton cœur.

Tu nous as montré que ton amour était toujours prêt à être donné.

Merci pour ta confiance, Chaton. Merci pour ton amour. Merci pour la force et les leçons que tu nous as donné.

J’espère être aussi courageuse que tu l’as été toute ta vie.

Je t’aime mon chat aujourd’hui et à jamais.

Marine
Soigneuse

Une redoutable machine à tuer

Ma première vison de toi au refuge fut celle d’une redoutable machine à tuer.

Agressif, en colère, tout semblait perdu pour toi. Ainsi avais-tu été formaté par l’humain…

Tu aurais dû être euthanasié mais AVA – Agir pour la Vie Animale t’a sauvé malgré ton lourd passé et le risque que cela comportait.

Au fil des jours, des mois, des années, et grâce au formidable travail de certains soigneurs, tu as commencé à montrer un autre visage, celui de l’espoir !

C’est alors qu’un long travail a commencé.

Moi et d’autres, nous avons eu a cœur de démontrer que tu n’étais pas qu’une machine à tuer, qu’avec du temps, de l’amour et de la passion, tu pouvais regagner confiance en l’humain, qu’on pouvait te réhabiliter.

Nous sommes allés au-delà de ce que nous connaissions de toi.

Ce fut un long combat, contre les idées reçues, les préjugés, contre la peur, parfois contre notre peur !

Mais, chacun à notre tour, de soigneur en soigneur, nous avons finalement réussi !

Je suis très très fière d’avoir fait partie de cette magnifique chaîne.

Grâce à notre combat, tu as fini les dernières années de ta vie entouré d’amour, de câlins, de sorties, exactement comme tu le méritais !

Maintenant tu en es en paix mon Chaton.

Fanny
Ex soigneuse